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Témoin du boom de la bauxite en Guinée

Les efforts pour améliorer le suivi de l’activité minière devront profiter aux communautés touchées

Des agriculteurs du village de Dapilon, dans la région de Boké, contemplent les terres fertiles situées le long du Rio Nunez qui ont été défrichées pour la construction d’un port minier appartenant à la Société minière de Boké. Janvier 2018.  © 2018 Ricci Shryock pour Human Rights Watch

Plus tôt ce mois-ci, parcourant du regard de vastes étendues de terre rouge et aride – le paysage d’une mine de bauxite en pleine expansion –, j’ai vu de mes yeux à quoi ressemblait la croissance rapide de l’industrie d’extraction de bauxite en Guinée. La bauxite de Guinée est utilisée pour produire de l’aluminium, utilisé dans le monde entier pour fabriquer des pièces automobiles et aéronautiques ainsi que des produits de consommation comme les canettes et le papier aluminium.

Human Rights Watch a publié le 4 octobre un rapport détaillant en quoi l’accent qui est mis sur une expansion rapide des mines, en l’absence d’un suivi suffisant de la part de l’État, a dévasté l’existence et les moyens de subsistance de nombreux villageois. Au cours de mon voyage dans la région de Boké, capitale du boom de la bauxite, on comprenait clairement quels sont les sentiments des nombreuses personnes qui, impuissantes, voient les entreprises minières détruire leurs terres ancestrales, endommager leurs sources d’eau et couvrir de poussière les maisons et les arbres.

Réagissant à notre rapport, le gouvernement guinéen et les sociétés minières ont décrit les mesures en cours pour réduire l’impact sur les communautés locales. Le ministère des Mines a insisté sur les « actions vigoureuses » qu’il entreprend pour s’attaquer au problème des conséquences de l’extraction, notamment en évaluant les pratiques environnementales et sociales des entreprises. La Compagnie des Bauxites de Guinée (CBG), une des deux sociétés citées dans notre rapport, a déclaré qu’elle mettait en place une politique d’entreprise amendée portant sur la gestion des terres, afin de mieux respecter les droits fonciers des agriculteurs. La Société Minière de Boké (SMB), un consortium minier dont notre rapport avait pointé du doigt l’incapacité à anticiper et atténuer l’impact de ses opérations d’extraction quand ils ont démarré en 2015, va déployer un nouveau plan de gestion environnementale et sociale en 2019.

Ces initiatives suggèrent un progrès. Mais lorsque j’ai visité les communautés de la région de Boké, j’ai constaté que pour le moment elles ont eu peu de retombées. À Hamdallaye, un village où la CBG a promis de remplacer la terre agricole perdue au bénéfice des mines ces dernières années, les villageois ne savent toujours pas combien de terres ils recevront, ni quand. Le village, protégé du soleil ardent par des arbres dont la belle stature témoigne de son histoire propre, devrait être relocalisé en 2019 vers un nouveau site, qui pour l’instant ressemble bien plus à une mine abandonnée qu’à un village habitable. À Lansanayah, un village où la SMB a lancé un programme pour réhabiliter une mine abandonnée en plantant des anacardiers, les villageois ne savent pas si les arbrisseaux tout juste mis en terre survivront à la saison sèche.

Le boom de la bauxite en Guinée ne fait que commencer : de nouvelles entreprises affluent, d’autres prévoient de construire des raffineries, ce qui est encore plus risqué pour les communautés. Les efforts pour résoudre le problème des impacts de l’extraction minière sur les droits des populations sont les bienvenues, mais c’est au sein des communautés les plus touchées par les mines que doit se produire un changement réel.

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