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Russie : Nouvelle vague de répression anti-gay en Tchétchénie

La police tchétchène a arrêté et torturé des hommes présumés homosexuels à Grozny

Un gardien d’un centre de détention de Grozny, en Tchétchénie, brandit son bâton au-dessus d’un détenu présumé homosexuel, allongé par terre et dont le crâne a été rasé. Illustration basée sur le témoignage de ce détenu. © 2019 John Holmes pour Human Rights Watch

(Moscou, le 8 mai 2019) - La police tchétchène a procédé à une nouvelle série d’arrestations illégales, de passages à tabac et d'actes humiliants à l’encontre d'hommes présumés homosexuels ou bisexuels, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui. Ces nouvelles exactions s'inscrivent dans un climat d'impunité totale pour la précédente « purge » anti-gay menée à vaste échelle au printemps 2017. Les autorités russes devraient mener une enquête rigoureuse sur les allégations d’exactions commises contre les homosexuels en Tchétchénie, et s’assurer que les auteurs d’abus soient tenus responsables de leurs actes.

Human Rights Watch a recueilli les témoignages de quatre hommes qui ont été détenus dans un centre géré par le Département des affaires intérieures de Grozny entre décembre 2018 et février 2019, durant des périodes allant de trois jours à vingt jours. La police les a battus en utilisant des bâtons et des tuyaux en polypropylène, les a frappés à coups de pied, et a torturé trois des quatre hommes par le biais de décharges électriques. Un détenu a été violé avec un bâton.

Ces témoignages sont semblables à d’autres récits cités dans une plainte déposée le 29 janvier par le Réseau LGBT russe (Russian LGBT Network) auprès de la principale agence russe chargée d’enquêtes criminelles. Selon le Réseau LGBT russe, qui défend les droits des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres (LGBT) dans ce pays, la police à Grozny, capitale de la Tchétchénie, a détenu et maltraité au moins 14 hommes entre décembre 2018 et janvier 2019. Le nombre réel de placements en détention serait encore plus élevé.

« Aucune enquête efficace n’a été menée au sujet de la purge anti-gay de 2017, lors de laquelle la police tchétchène avait détenu et torturé des dizaines d'hommes soupçonnés d'être homosexuels », a déclaré Rachel Denber, directrice adjointe de la division Europe et Asie centrale à Human Rights Regarder. « L'impunité pour la purge anti-gay de 2017 a conduit à une nouvelle vague de torture et d'actes humiliants en Tchétchénie. »

Les quatre hommes interrogés par Human Rights Watch ont déclaré que la police les avait interrogés sous la torture, leur demandant d'identifier d'autres hommes homosexuels dans leurs cercles de relations. Dans certains cas la police les a interrogés au sujet de photos sauvegardées sur leurs téléphones portables, qui avaient été confisqués.

L’un des quatre hommes a indiqué que lors de sa remise en liberté, la police avait révélé à sa famille son orientation sexuelle et indirectement encouragé des membres de sa famille à le tuer. Dans au moins trois cas, la police a exigé d’importantes sommes d’argent pour la libération des hommes détenus.

Les quatre hommes ont déclaré qu’ils n’avaient reçu pratiquement aucune nourriture et que très peu d’eau. Trois d’entre eux ont indiqué que la police leur avait rasé les cheveux et la barbe, ou avaient contraient d’autres détenus à le faire. Deux hommes ont expliqué qu’ils avaient été détenus avec une quarantaine d'autres hommes dans une grande cellule située au quatrième étage de l’un des immeubles du département de la police de Grozny.

Selon Igor Kochetkov, un représentant du Réseau LGBT russe, la police tchétchène a détenu au moins 23 hommes entre décembre 2018 et avril 2019, en raison de leur homosexualité présumée.

Les autorités tchétchènes ont démenti les informations faisant état de cette nouvelle vague de persécution. En janvier, Alvi Karimov, porte-parole du gouverneur de la Tchétchénie Ramzan Kadyrov, a déclaré à Interfax qu’il s’agissait d’un «  mensonge absolu ».

Malgré les réactions internationales suite à la vague de répression de 2017, et les promesses des autorités russes d’enquêter à ce sujet, le gouvernement n’a pris aucune mesure dans ce sens. Aucune suite n’a été donnée à la plainte déposée par une victime en octobre 2017. En mai 2018, le ministre russe de la Justice, Aleksander Konovalov, a déclaré devant le Conseil des droits de l'homme (CDH) des Nations Unies que les enquêtes menées n’avaient « pas permis de confirmer des preuves de violations de droits, ni même de trouver des représentants de la communauté LGBT en Tchétchénie ».

En novembre 2018, 16 États membres de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) ont désigné un Rapporteur pour enquêter sur les allégations d'abus en Tchétchénie, y compris la purge anti-gay. En décembre 2018, le Rapporteur a présenté au Conseil permanent de l’OSCE un rapport qui concluait que les autorités tchétchènes persécutaient les personnes LGBT, attaquaient les défenseurs des droits humains et commettaient des actes de torture et d’autres exactions flagrantes, tandis que le gouvernement russe semblait « soutenir les auteurs d’abus plutôt que les victimes ».

En mars, 30 pays ont soutenu une déclaration conjointe devant le CDH, exprimant leur profonde préoccupation face aux nouvelles informations faisant état de persécutions de personnes LGBT en Tchétchénie, et appelant à une enquête approfondie et impartiale.

Les partenaires internationaux de la Russie, y compris l’Union européenne et ses États membres, les États-Unis et le Canada devraient faire pression sur les autorités russes afin qu’elles enquêtent de manière rigoureuse sur les cas de torture et tiennent leurs auteurs responsables de leurs actes. Ces pays devraient également permettre d’urgence aux victimes, ou aux personnes menacées de persécution, de se réfugier sur leurs territoires.

Communiqué complet en anglais :

www.hrw.org/news/2019/05/08/russia-new-anti-gay-crackdown-chechnya

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