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Bozizé de retour en République centrafricaine

L’ex-président devrait être tenu responsable en cas d’implication avérée dans des crimes passés

La semaine dernière, l’ancien président de la République centrafricaine, François Bozizé, est rentré dans son pays après plus de six ans d’exil. Plus tôt ce mois-ci, le porte-parole de son parti a déclaré que Bozizé se présenterait à l’élection présidentielle de décembre 2020.

Des combattants de la Séléka, photographiés devant la villa de l’ancien Président centrafricain François Bozizé, sur le terrain du centre de formation militaire de Bossembélé. La structure carrée au premier plan aurait servi de cellule étroite pour des prisonniers, forcés de s’y tenir debout. Un autre trou semblable se situait non loin de là. © 2013 Human Rights Watch

Bozizé a fui en mars 2013 alors que la Séléka, une coalition rebelle majoritairement musulmane du nord-est, a pris le contrôle de la République centrafricaine sur fond d’abus généralisés. La Séléka a provoqué la formation de milices locales, appelées anti-balaka, qui à leur tour ont pris pour cibles des civils musulmans et déplacé des centaines de milliers de personnes.

Bozizé est de retour alors qu’il est sous le coup de sanctions du Conseil de sécurité de l’ONU pour avoir soutenu et encouragé des attaques anti-balaka. Un mandat d’arrêt international émis par les autorités centrafricaines en 2013 accuse Bozizé de « crimes contre l’humanité » et d’« incitation à la haine et au génocide ». Créé par une loi en juin 2015, la Cour pénale spéciale a pour mandat d’établir responsabilités pour les crimes commis alors que Bozizé dirigeait le pays.

Le retour de Bozizé a eu lieu dans un contexte marqué par des conflits, alimentés en partie par la corruption, le népotisme et les abus commis sous sa présidence. Plus de 75 % du pays reste aujourd’hui sous le contrôle de groupes armés.

La garde présidentielle de Bozizé est accusée d’avoir tué au moins des centaines de civils et incendié des milliers de foyers pendant les troubles survenus au milieu des années 2000. Certains des crimes les plus graves commis sous sa présidence ont été perpétrés au centre de formation militaire de Bossembélé, connu sous le nom de « Guantanamo ». En avril 2013, j’ai interviewé 10 anciens détenus de ce centre, qui ont décrit une quasi-famine, des passages à tabac, des actes de torture et des exécutions extrajudiciaires constants.

En juin, je me suis rendu au centre surnommé « Guantanamo », où deux cellules m’ont été montrées – des puits de béton creusés à même le sol – à seulement deux mètres de la villa de Bozizé. Les plaques en ciment qui les recouvraient comportaient des trous d’aération pour permettre aux prisonniers de respirer, mais aucun espace n’était prévu pour leurs déplacements. D’anciens prisonniers ont affirmé que des individus avaient étaient maintenu en détention dans ces cellules jusqu’à ce que mort s’ensuive.

Le retour de Bozizé aura des répercussions politiques, qu’il se présente ou non à la présidence. Mais il offre également au nouveau gouvernement de la République centrafricaine et à ses partenaires internationaux une réelle opportunité d’engager des poursuites relatives aux crimes présumés commis sous sa présidence et par ses partisans, et de mettre fin à l’impunité généralisée qui caractérise la crise en cours dans le pays.

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