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États-Unis : La Commission des droits inaliénables ne devrait pas hiérarchiser les droits

Il ne faut pas se servir de la religion pour justifier des discriminations à l’encontre des femmes et des personnes LGBTQ

Le secrétaire d'État américain Mike Pompeo annonce la création de la Commission des droits inaliénables, dirigée par Mary Ann Glendon (à gauche), professeure à la faculté de droit de Harvard et ex-ambassadrice des États-Unis près le Saint-Siège, au siège du Département d'État à Washington, le 8 juillet 2019. © 2019 AP Photo / Pablo Martinez Monsivais © 2019 AP Photo/Pablo Martinez Monsivais

La Commission des droits inaliénables du Département d’État américain devrait honorer les engagements internationaux des État-Unis envers les droits humains, et non pas utiliser la liberté de religion comme paravent pour permettre des violations des droits des femmes, des filles et des personnes LGBTQ, ont déclaré aujourd’hui, dans une lettre adressée à cette Commission, 167 activistes et organisations de défense des droits humains de premier plan répartis dans 28 pays. 

La Commission des droits inaliénables (« Commission on Unalienable Rights ») est un organe consultatif créé en juillet 2019 par Michael Pompeo, le Secrétaire d’État américain, pour conseiller le gouvernement sur les questions relatives aux droits humains dans la politique étrangère américaine. Elle a suscité, parmi les experts, l’inquiétude que les États-Unis cherchent à réécrire unilatéralement des obligations en matière de droits humains qui ont été acceptées et à créer une hiérarchie parmi les droits.

Le Centre des droits reproductifs, Human Rights Watch, la Coalition internationale pour la santé des femmes (CISF) et d’autres organisations et activistes du monde entier ont déclaré que la Commission devrait prioriser le droit de chacun à la santé et au bien-être, sans discrimination, et reconnaître que les droits reproductifs sont clairement établis en droit international. Ces droits sont essentiels pour la dignité et le bien-être des individus et ne devraient pas être traités comme s’ils étaient moins dignes de protection que d’autres droits humains.

« L’administration Trump a régulièrement utilisé la liberté de religion comme outil de discrimination à l’encontre des femmes, des filles et des personnes LGBTQ », a déclaré Françoise Girard, présidente de la CISF. « La Commission des droits inaliénables n’est qu’une tentative cynique de créer une hiérarchie parmi les droits et de dénier leurs droits fondamentaux aux personnes les plus marginalisées du monde. Cette politisation des droits humains internationaux constitue un dangereux précédent et ne peut qu’encourager les gouvernements répressifs à travers le monde à trier et à choisir parmi les obligations relatives aux droits humains en se basant sur leur idéologie politique – évolution qui aurait de graves conséquences pour les femmes et les filles. »

La Commission sert, selon les propres mots du secrétaire d’État Pompeo, à distinguer entre les droits « inaliénables » et les droits prétendument optionnels – signe inquiétant des objectifs de la Commission. Ces craintes sont renforcées par la nomination au sein de la Commission de personnes réputées pour s’être opposées depuis longtemps à l’accès aux services de santé sexuelle et reproductive, aux droits des femmes et à ceux des personnes lesbiennes, gay, bisexuelles, transgenres et queers. Les premières réunions publiques de la Commission n’ont pas atténué les inquiétudes, les commissaires ayant à plusieurs reprises souligné la primauté de la liberté de religion sur les autres droits.

« La Commission a été créée de manière inopportune comme une nouvelle tentative éhontée de la part de cette administration de supprimer les protections des droits sexuels et reproductifs inscrites dans le droit international humanitaire », a affirmé Nancy Northup, présidente et directrice générale du Centre pour les droits reproductifs. « Les droits reproductifs sont des droits humains. Ces tentatives du département d’État américain, par le biais de la Commission, d’effectuer un tri parmi les droits et de choisir lesquels les États-Unis vont reconnaître et prioriser menace d’éroder les protections des femmes, des personnes LGBTQ et d’autres communautés marginalisées et vulnérables dans le monde entier. »

Les instruments et mécanismes de défense des droits humains, dont beaucoup ont été ratifiés par les États-Unis, présentent clairement des droits fondamentaux qui sont universels, interdépendants et indissociables. En semant le doute sur des décennies de jurisprudence du droit international en matière de droits humains, l’administration Trump offre un prétexte aux régimes qui cherchent à renier des protections qui sont essentielles pour les femmes, les filles, les personnes LGBTQ et les groupes minoritaires dans le monde entier, affirme la lettre, dont les signataires exhortent les États-Unis à soutenir les droits humains dans leur totalité, et pas seulement ceux qui cadrent avec une idéologie politique étroite.

La liberté de religion – qui constitue un droit humain fondamental – est de plus en plus utilisée à mauvais escient comme excuse pour exercer des discriminations, avec des conséquences particulièrement graves pour les femmes, les filles et les personnes LGBTQ. Par exemple, des prestataires de soins de santé dans le monde entier refusent régulièrement de fournir des services critiques – notamment des avortements, des contraceptifs et des services d’affirmation du genre – sous prétexte que cela va à l’encontre de leurs croyances personnelles. À cette fin, l’administration Trump s’est faite la championne du droit à la liberté de religion aux Nations Unies et auprès de l’Organisation mondiale de la santé, dans une tentative de restreindre encore davantage les droits sexuels et reproductifs.

« L’administration Trump est connue pour ses efforts visant à réduire les droits humains des femmes à chaque occasion et cette Commission n’est qu’une tentative de fournir une excuse pour des discriminations insidieuses à l’encontre de femmes et de filles dans le monde entier qui cherchent à réaliser leurs droits humains et à accéder aux prestations de santé dont elles ont besoin », a déclaré Amanda Klasing, co-directrice par intérim de la division Droits des femmes à Human Rights Watch. « Redéfinir certains droits, et par extension certaines êtres humains, comme étant ‘moins égaux’ ne fait qu’accroître l’inégalité, l’insécurité et l’injustice. »

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