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Irak: Des groupes d'insurgés responsables de crimes de guerre

Un rapport conteste les justifications d'attaques contre les civils

Les diverses explications avancées par les groupes d'insurgés en Irak pour leurs attaques sur des civils ne sont pas justifiées par le droit international, a affirmé Human Rights Watch dans un rapport publié aujourd'hui.

Le rapport de 140 pages, intitulé Un visage et un nom: les victimes civiles de groupes d'insurgés en Irak (A Face and a Name: Civilian Victims of Insurgent Groups in Iraq), constitue l'étude la plus détaillée à ce jour sur les abus commis par les groupes d'insurgés. Le rapport présente et démonte de façon systématique les arguments employés par certains groupes d'insurgés et leurs partisans pour justifier les attaques illégales contre des civils.

Les lois de la guerre ne proscrivent pas les groupes d'insurgés et n'interdisent pas les attaques sur des cibles militaires légitimes, mais elles restreignent les moyens et la manière d'attaquer, et obligent toutes les forces dans un conflit à protéger les civils et autres non-combattants. Le ciblage délibéré de civils durant un conflit armé constitue un crime de guerre.

“Il n'y aucune justification capable de défendre la prise de civils pour cible, en Irak ou ailleurs,” a déclaré Sarah Leah Whitson, directrice de la Division Moyen Orient et Afrique du Nord de Human Rights Watch. “Les groupes armés ainsi que les gouvernements doivent respecter les lois de la guerre.”

Le rapport examine les groupes civils ciblés par les insurgés—comme les communautés ethniques et religieuses en Irak, les personnalités politiques, les universitaires, les médias et les femmes—ainsi que l'impact des attaques ciblées sur ces groupes. Grâce à des photos et à des témoignages directs obtenus sur le terrain en Irak ainsi que dans des reportages de médias, le rapport donne aux victimes un visage et un nom.

L'invasion de l'Irak dirigée par les Etats-Unis et l'occupation militaire qui s'est ensuivie ont conduit à des dizaines de milliers de morts de civils, et ont déclenché l'émergence de ces groupes d'insurgés. Deux chapitres de ce rapport résument les violations des lois de la guerre par les forces des gouvernements américain et irakien. Mais ces violations ne justifient pas les attaques illégales des insurgés, précise le rapport.

“Les forces américaines ont employé une force excessive et sans discernement, ont torturé des détenus et ont maintenu en détention des milliers d'irakiens sans procédure légale régulière,” a déclaré Whitson. “Mais cela ne justifie pas les attaques de groupes d'insurgés ayant délibérément ciblé et tué des civils.”

Des précédents rapports de Human Rights Watch ont attesté de l'emploi par l'armée américaine d'une force excessive et sans discernement, des détentions illégales, du recours à la torture dans des lieux comme Abu Ghraib, ainsi que de l’emploi de la torture par la police irakienne (cf. liste ci-dessous).

Le nouveau rapport analyse l'insurrection en Irak et se focalise sur les groupes qui portent la plus grande responsabilité pour les abus, notamment Al-Qaida en Irak, Ansar al-Sunna et l'Armée islamique en Irak, qui ont tous ciblé des civils pour des enlèvements et exécutions. Les deux premiers groupes se sont vantés à maintes reprises d'avoir commis des attentats à la voiture piégée et des attentats-suicides massifs dans des mosquées, sur des marchés, à des arrêts d'autobus et dans d'autres zones civiles. De tels actes sont des crimes de guerre et peuvent dans certains cas constituer des crimes contre l'humanité, définis comme des crimes sérieux commis dans le cadre d'une attaque répandue ou systématique contre une population civile.

Le rapport atteste les assassinats de représentants du gouvernement, de personnalités politiques, de juges, de journalistes, de professionnels de l'aide humanitaire, de médecins, de professeurs ainsi que de personnes considérées comme des collaborateurs des forces étrangères en Irak: traducteurs, nettoyeurs et autres personnes exerçant un emploi civil pour la Force multinationale dirigée par les États-Unis. Les insurgés ont mené des attentats-suicides et des attaques à la voiture piégées contre des mosquées shiites, des églises chrétiennes et des partis politiques kurdes avec l'objectif de tuer des civils. Les allégations selon lesquelles ces communautés seraient des cibles légitimes parce qu’elles soutiennent les forces étrangères en Irak ne sont nullement basées sur le droit international, qui exige la protection de tout civil ne participant pas activement aux hostilités.

Les groupes d'insurgés ont aussi torturé et exécuté sommairement des civils ainsi que des combattants qu'ils avaient capturés et détenus, parfois par décapitation. Ils ont en outre mené des attaques contre des cibles militaires légitimes, comme des convois de l'armée, mais d'une telle manière que la perte prévisible de vies civiles a été très disproportionnée par rapport au gain militaire.

Certains groupes d'insurgés et partisans de l'insurrection ont condamné les attaques visant des civils. Dans un cas, un groupe a ordonné à ses membres d'éviter les attaques contre les civils et a apparemment cessé les opérations dans les zones urbaines où ceux-ci pourraient être blessés. Le rapport recommande que tous les groupes d'insurgés proclament des condamnations similaires et ordonnent à leurs membres de cesser d'attaquer les civils.

Les dirigeants politiques et religieux en Irak et à l'étranger qui soutiennent l'insurrection doivent aussi condamner les attaques illégales, a ajouté le rapport. Human Rights Watch a rencontré plusieurs représentants des médias et de la société civile dans le monde arabe pour discuter de la pratique de ciblage de civils employée par des groupes armés dans le Moyen Orient.

“Les personnes avec qui nous avons discuté au Moyen Orient sont de plus en plus dégoûtées par les actions des groupes d'insurgés en Irak, même si elles souhaitent elles-mêmes un retrait des troupes américaines,” a déclaré Whitson. “Il est temps pour les dirigeants politiques et religieux qui soutiennent l'insurrection de dénoncer en public ces atrocités.”

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