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Ukraine : Urgence de l’obligation de rendre des comptes pour les abus

Les autorités devraient protéger les civils contre les risques d’exactions

(Kiev) – Au cours de l’année 2016, les détentions et les abus de civils dans le cadre du conflit qui s’est tenu dans l’est de l’Ukraine sont restés pour la plupart sans réponse, a déclaré aujourd’hui Human Rights Watch dans son Rapport mondial 2017 (version abrégée en français).

Dans l’est du pays, le gouvernement ukrainien et les séparatistes soutenus par la Russie ont détenu des dizaines de civils parce qu’ils avaient supposément collaboré avec l’autre camp, et les ont maintenus en détention arbitraire prolongée, souvent au secret, leur refusant tout contact avec des avocats et leurs familles. Dans certains cas, les détenus ont fait l’objet de disparitions forcées tandis que les autorités niaient leur détention ou refusaient de fournir des informations sur leur localisation. Nombre d’entre eux ont été torturés ou ont subi de mauvais traitements ; certains n’ont pas reçu l’attention médicale nécessaire.

« Les disparitions forcées et la torture de civils par les deux camps nourrissent une atmosphère d’illégalité et laissent la population de l’est de l’Ukraine exposée aux abus », a déclaré Tanya Cooper, chercheuse sur l’Ukraine à Human Rights Watch. « Les deux parties devraient prendre des mesures immédiates pour mettre fin à ces abus et pour s’assurer que les auteurs des crimes graves perpétrés par leurs forces respectives soient tenus responsables. »
 

Des membres de la Garde nationale rassemblés près du siège de la présidence ukrainienne, à Kiev, le 1er décembre 2016, lors d’une manifestation anti-gouvernementale de groupes nationalistes exigeant la libération de partisans emprisonnés.  © 2016 Reuters / Gleb Garanich

Amnesty International et Human Rights Watch ont découvert conjointement qu’au moins 18 personnes avaient été victimes de disparitions forcées à la fin de mois de juillet et étaient détenues au secret par le Service de sécurité de l’Ukraine (SBU) dans leurs locaux situés à Kharkiv depuis fin juillet, dont l’un d’entre eux depuis au moins 16 mois. Dans les Républiques populaires autoproclamées de Donetsk (RPD) et de Lougansk (RPL), les services de sécurité locaux opèrent complètement en dehors de l’État de droit, privant les personnes sous leur garde de leurs droits et ne leur laissant aucun moyen d’obtenir justice.

Dans cette 27e édition annuelle de son Rapport mondial (version intégrale en anglais de 687 pages, version abrégée en français de 247 pages), Human Rights Watch examine les pratiques en matière de droits humains dans plus de 90 pays. Dans son introduction, le Directeur exécutif, Kenneth Roth, explique qu'une nouvelle génération de populistes autoritaires cherche à infirmer le concept d'une protection individuelle basée sur les droits humains, en caractérisant ces droits comme une entrave à la volonté de la majorité. Pour toutes les personnes qui se sentent laissées de côté par l'économie mondialisée et qui craignent de plus en plus d'être exposées à des violences et à des crimes, les organisations de la société civile, les médias et le public ont des rôles essentiels à jouer en réaffirmant la validité des valeurs sur lesquelles les démocraties respectueuses des droits humains ont été édifiées.


Les autorités ukrainiennes ont fait quelques progrès pour tenir responsables les auteurs des abus liés au conflit en poursuivant en justice certains des membres des bataillons militaires et policiers impliqués dans de graves abus contre des civils en 2014 et 2015.

Les journalistes couvrant le conflit armé ont aussi subi des abus. Les autorités ukrainiennes n’ont pas réagi correctement aux attaques des groupes nationalistes contre des journalistes et à la fuite des données personnelles de centaines de journalistes et d’autres personnes accréditées par le centre de presse de la RPL. Aucune enquête efficace n’a été menée pour identifier et poursuivre en justice les personnes responsables.

En juillet, une voiture piégée a tué un éminent journaliste d’investigation, Pavel Sheremet. L’enquête est toujours en cours.

Parmi les autres problèmes rencontrés en Ukraine en 2016, l’hostilité à l’égard des lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres (LGBT) reste forte chez de hauts représentants du gouvernement et le public, bien que plusieurs événements en faveur de la communauté LGBT soient généralement restés à l’abri de violence, contrairement aux années précédentes.

En Crimée, les Tatars de Crimée font face à une persécution accentuée à cause de leur opposition pacifique à l’occupation par la Russie. Plusieurs fervents dirigeants et activistes ont été harcelés, détenus ou inculpés de séparatisme. En septembre, la Cour suprême de Russie a confirmé une décision précédente de la Cour visant à interdire le Majlis, organe représentatif élu des Tatars de Crimée, au motif d’implication dans des activités « extrémistes ».

« L’Ukraine a dû s’attaquer à des crises profondes ces dernières années, mais cela ne décharge pas pour autant le gouvernement de ses obligations vis-à-vis des droits humains », a affirmé Tanya Cooper. « Un fort engagement pour la protection des droits de tous en Ukraine est la seule manière d’aider le pays à se relever des ravages causés par le conflit oriental. »
 

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Oct. 2017

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