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Ce n’est pas le moment de détourner le regard du Burundi

Les experts de l’ONU sont menacés et critiqués par le gouvernement

Depuis un mois, l’ambassadeur du Burundi auprès des Nations Unies, Albert Shingiro, menace publiquement de « traduire en justice » les membres d’une Commission d’enquête de l’ONU qui enquêtent sur les exactions commises dans le pays, suggérant qu’ils pourraient être poursuivis pour diffamation et « tentative de déstabilisation » des institutions burundaises. 

Des résidents devant leurs maisons le 12 décembre 2015 à Nyakabiga, dans la capitale burundaise Bujumbura, regardent le corps d’un homme tué par balles le 11 décembre.  © 2015 Jean Pierre Aimé Harerimana

Cette semaine, le Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’homme a répliqué, qualifiant ces attaques d’« inacceptables. »

Mais en général, les États membres de l’ONU, y compris les pays qui ont poussé à la création de la commission d’enquête sur le Burundi, ne se sont toujours pas exprimés publiquement pour soutenir les experts. Rester silencieux devant de telles menaces ne peut qu’enhardir les autorités burundaises.

En dépit des menaces proférées publiquement contre les experts de l’ONU, le représentant spécial du Secrétaire général pour le Burundi, Michel Kafando, a déclaré au Conseil de sécurité, dans un compte-rendu de la situation cette semaine, que les relations entre l’ONU et le Burundi semblaient « aller dans le bon sens. » Il n’a pas non plus sonné l’alarme sur la crise des droits humains dans ce pays.

La seule chose dont les experts de l’ONU sont « coupables » est d’avoir respecté le mandat qui leur a été donné l’année dernière par le Conseil des droits de l’homme : enquêter sur les abus et les violations des droits humains commis au Burundi depuis avril 2015. Dans leur dernier rapport, les experts concluaient qu’ils avaient « des motifs raisonnables de croire que des crimes contre l’humanité ont été commis depuis avril 2015 au Burundi. » Dans ce rapport, ils confirmaient que les exécutions extrajudiciaires, les arrestations et détentions arbitraires, les disparitions forcées, les actes de torture et les violences sexuelles se poursuivaient, et ils rendaient responsables de la plupart de ces violations des membres des services de renseignement, de la police, de l’armée et de la ligue des jeunes du parti au pouvoir.

Peu après la publication du rapport de la Commission, les juges de la Cour pénale internationale (CPI) ont autorisé l’ouverture d’une enquête sur le Burundi. Cette décision a sans aucun doute constitué un revers dans les efforts du gouvernement – qui a officialisé son retrait de la CPI en octobre – pour décourager tout examen approfondi du rôle qu’il a joué dans d’horribles violations des droits humains commises au Burundi.

Les pays qui ont insisté, dans le cadre du Conseil des droits de l’homme à Genève, pour que cette enquête soit ouverte, devraient soutenir leurs experts. Le Conseil de sécurité devrait faire de même. Faute de quoi, la Commission d’enquête risque de se retrouver marginalisée, comme l’infructueuse mission de police de l’ONU au Burundi autorisée l’année dernière par le Conseil de sécurité. Les civils burundais sont toujours exposés au risque de subir des abus. Ce n’est pas le moment de détourner le regard.

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