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Des personnes participant à un rassemblement de la communauté LGBT à Moscou tiennent un drapeau aux couleurs de l’arc-en-ciel, sur lequel figure le slogan « Faites l’amour, pas la guerre », face à un policier qui s’apprête à intervenir, le 30 mai 2015. ©2015 Reuters/Maxim Shemetov

La FIFA, organe directeur du football international, souffre d'un problème lié à sa réputation. En 2015, Sepp Blatter, président de la FIFA à l'époque et d'autres cadres supérieurs, ont fait l'objet d'accusations pour corruption. Ensuite, ils ont déclenché un tollé en attribuant la Coupe du monde de football 2018 et 2022 à la Russie et au Qatar respectivement en raison du manque de respect des droits humains dans ces pays.

Pour faire amende honorable, du moins en partie, la FIFA a convenu d'exiger des normes minimales en matière de droits humains de la part des pays candidats à l'organisation de la Coupe du monde de football, notamment la tolérance zéro en ce qui concerne la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle.

Ces nouvelles politiques seront soumises à un test initial le 14 juin lors de l'ouverture de la  Coupe du Monde de football de la FIFA 2018 en Russie, pays ouvertement hostile à la communauté LGBT. Des milliards de personnes suivront les matchs que joueront 32 équipes nationales de football international de première division, et ce, dans 11 villes de Russie. La Coupe du monde de football est censée être une joyeuse célébration du sport et de l'humanité. Pourtant, de nombreuses personnes issues de la communauté LGBT ne célébreront pas l'événement.

La FIFA se doit d'indiquer clairement maintenant qu'elle s'attend à ce que la Russie respecte ses règles pendant le tournoi. Établir des politiques visant à promouvoir les droits humains n'était qu'une première étape essentielle pour la FIFA. Le plus dur reste à les mettre en œuvre, particulièrement pour des hôtes potentiels répressifs qui ont l'intention de laver leur image internationale grâce au sport.

Le mois de juin marquera le cinquième anniversaire de la loi sur la propagande homophobe discriminatoire de la Russie. Adoptée quelques mois avant les Jeux olympiques de Sochi de 2014, la loi sanctionne les actions de défense de la communauté LGBT et crée un dangereux climat de stigmatisation et de violence à son encontre. La violence à l'égard des homosexuels a pris une telle ampleur en Russie que F.A.R.E.(Football Against Racism in Europe), organisation visant à lutter contre la discrimination dans le football a mis en garde les fans qui assisteront aux matchs de la Coupe du monde avec leur partenaire de même sexe contre le fait de se tenir la main en public.

En 2017, la République russe de Tchétchénie a perpétré une horrible purge homophobe. Les forces de sécurité tchétchènes ont arrêté des hommes soupçonnés d'être homosexuels ou bisexuels, les torturant et en kidnappant même certains. « Il n'y a pas d'homosexuels en Tchétchénie », a déclaré Ramzan Kadyrov, président de la République de Tchétchénie, à HBO l'année dernière. « Pour purifier notre sang, s'il y en a, prenez-les. »

Loin de dénoncer ces propos, la FIFA, au mieux, ferme les yeux sur cette situation d'homophobie, au pire, elle la gratifie. L'organisation a placé Grozny, la capitale tchétchène, sur une liste de sites d'entraînement de la Coupe du monde.

Le Qatar, où les homosexuels sont passibles d'une peine de prison allant de un à trois ans, sera le prochain pays organisateur de la Coupe du Monde qui se tiendra en 2022. Le 13 juin, la FIFA départagera les candidats à l'organisation de la Coupe du monde de 2026 en choisissant soit l'alliance constituée entre les États-Unis, le Canada et le Mexique, d'une part, soit le Maroc, d'autre part. Or, le Code pénal marocain punit d'une peine d'emprisonnement les relations homosexuelles. La législation a entraîné de nombreuses arrestations au cours des dernières années, notamment celle de deux adolescentes en 2016 au motif qu'elles s'embrassaient.

Ces lois contre les homosexuels s'inscrivent en porte à faux avec les statuts de la FIFA selon lesquels toute discrimination «  est expressément interdite, sous peine de suspension ou d'exclusion ». Dans le cadre d'un processus de deux ans visant à mettre en œuvre les réformes relatives aux droits promises en 2015, le président de la FIFA, Gianni Infantino, a instauré la première politique sur les droits humains selon laquelle la FIFA « s'engage à combattre toute forme de discrimination ». M. Infantino s'est également engagé à appliquer les Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux activités commerciales et aux droits humains dans toutes les opérations.

La FIFA affirme qu'elle sanctionnera les violations. « S'il existe des cas d'abus ou même la possibilité de voir des défenseurs des droits humains ou des journalistes rudoyés, en vertu de ses statuts et de sa politique relative aux droits humains, la FIFA interviendra », a déclaré Federico Addiechi, responsable Développement durable et Diversité à la FIFA au New York Times l'an dernier. Dans une lettre rédigée en 2017 sur la purge homophobe perpétrée en Tchétchénie adressée aux militants, le secrétaire général de la FIFA, Fatma Samoura, a écrit que les manifestations de l'organisation doivent se tenir dans des « environnements exempts de toute discrimination y compris celle fondée sur l'orientation sexuelle ».

Accueillir la Coupe du monde implique de renoncer à une partie de sa souveraineté. La FIFA a exigé et obtenu des changements sur les lois nationales avant la tenue de Coupes du monde précédentes. L'Afrique du Sud a mis en place des dizaines de « tribunaux ad hoc » visant principalement à instruire de petits délits en lien avec le tournoi et le Brésil a annulé la législation qui interdisait la consommation de bière dans les stades. Ce genre de pression devrait servir à faire avancer les droits humains.

La FIFA doit dire publiquement à la Russie qu'elle s'attend à ce que la communauté LGBT soit reçue de manière accueillante lors de chaque match de la Coupe du monde. Elle doit aussi indiquer clairement que le pays sera tenu responsable de faire comprendre le message à l'ensemble des responsables et des employés locaux, tant lors des matches qu'au-delà des stades.

Cela enverrait un signal fort vers des pays comme le Qatar et le Maroc selon lequel ils ne pourront accueillir les tournois de la Coupe du Monde de la FIFA sauf à réformer leurs politiques et lois édictées à l'encontre de la communauté LGBT.

Si la FIFA n'est pas en mesure de faire respecter ses règles, ce sont aux grands sponsors d'agir. Coca-Cola, Adidas, McDonald’s, Visa et d'autres multinationales dotées de politiques bannissant la discrimination doivent protéger leur propre réputation en insistant sur le fait que la FIFA tienne ses promesses. McDonald’s a déjà exprimé des « inquiétudes auprès de la FIFA quant à la situation des droits humains au Qatar » et annoncé qu'il ne serait plus sponsor de la Coupe du monde de football après 2018.

Au-delà de la Russie cette année, la FIFA doit avertir le Qatar que quatre ans représentent une durée suffisamment longue pour abroger sa législation contre la communauté LGBT et rendre publique et essentielle cette exigence lors de la sélection des futurs hôtes. En un mot, la FIFA doit affirmer que les pays qui ne seront pas capables de respecter les règles du jeu dans le domaine des droits humains ne pourront tout simplement pas prendre part à la compétition.

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