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Deux cas de blasphème de part et d’autre du monde musulman

Mohammed Cheikh Ould Mkhaitir et Asia Bibi n’ont toujours pas été remis en liberté en dépit de décisions de justice

Asia Bibi (à gauche) et Mohamed Cheikh Ould Mkhaitir (à droite), qui avaient été accusés de blasphème respectivement au Pakistan et en Mauritanie. © Reuters / © Privé

En raison de lois inhumaines sur le blasphème, les situations de deux ex-condamnés à mort vivant dans des parties éloignées du monde musulman présentent des parallèles évidents.

Au Pakistan, Asia Bibi a passé huit ans dans le couloir de la mort après qu’un tribunal l’a condamnée à la peine capitale pour « blasphème ». Asia Bibi, qui est chrétienne,  avait été accusée d’avoir dénigré l’islam après que ses voisins lui eurent reproché de boire dans leur verre alors qu’elle n’était pas musulmane.

Le 29 janvier, la Cour suprême du Pakistan a confirmé sa décision en date du 31 octobre qui annulait sa condamnation, lui ouvrant enfin la voie à la recherche de la sécurité et de l’asile à l’étranger.

Les autorités pakistanaises devraient maintenant permettre à Asia Bibi de quitter le pays. Elle ne devrait pas avoir à endurer, comme cela a été le cas du blogueur mauritanien Mohammed Cheikh Ould Mkhaitir, une longue attente pour retrouver sa liberté après sa victoire juridique devant les tribunaux.

Mkhaitir aurait dû sortir de prison il y a 15 mois, lorsqu’une cour d’appel a commué sa peine à deux ans d’emprisonnement au motif qu’il s’était repenti de son « blasphème ». Mkhaitir, un musulman, avait déjà passé trois ans à l’époque dans le couloir de la mort pour avoir critiqué les Mauritaniens qui invoquent les pratiques du prophète Mahomet pour justifier la discrimination à l’encontre de certains groupes aujourd’hui.

Certains partis islamistes au Pakistan et en Mauritanie ont exigé l’exécution de Bibi et de Mkhaitir. Au Pakistan, des extrémistes ont assassiné un gouverneur de province et un ministre du gouvernement qui avaient appelé à la remise en libéré de Bibi. La chef du parti islamiste Tehreek-i-Labaik a prévenu « qu’une guerre aura lieu » si celle-ci est autorisée à partir à l’étranger. Les avocats de Mkhaitir ont fait état d’allégations de menaces.

Depuis l’annulation en octobre, par la Cour suprême, de la condamnation de Bibi, les autorités l’ont assignée à résidence en « lieu sûr ». De nombreuses autres personnes ont été incarcérées pour violation de la loi pakistanaise sur le blasphème, notamment Junaid Hafeez, professeur d’université, en prison depuis mars 2013 pour avoir publié un statut sur Facebook.

Après que la cour d’appel mauritanienne a commué la peine prononcée contre Mkhaitir, ce dernier a été placé en détention secrète, où il se trouve toujours, en l’absence de raison juridique.

Les autorités mauritaniennes et pakistanaises craignent sans aucun doute une réaction violente si elles insistent pour réformer les lois encadrant le blasphème, ou autoriser Mkhaitir ou Bibi à se réfugier à l’étranger. Pourtant, ces affaires démontrent clairement que le maintien de ces législations entraîne également des violences devant les tribunaux, non seulement la violence de la peine capitale, mais aussi celle des masses instrumentalisées par des dirigeants politiques.

Le Coran n’ordonne pas de punition pour le blasphème. Les dirigeants mauritaniens et pakistanais doivent faire preuve de leadership et garantir les droits fondamentaux: il faut relâcher Bibi et Mkhaitir et entamer l’abrogation des lois sur le blasphème.

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