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COVID-19 : Publication d’une checklist pour veiller au respect des droits humains

Ce nouveau document comprend une liste de 40 questions visant à promouvoir des mesures gouvernementales respectueuses des droits

Des soldats patrouillent dans une rue du township d’Alexandra, dans la banlieue de Johannesburg, le 28 mars 2020, afin de contrôler la mise en œuvre des mesures de confinement prises pour endiguer la propagation de la pandémie de COVID-19 en Afrique du Sud. © 2020 Reuters/Siphiwe Sibeko

(New York, le 14 avril 2020) – Les gouvernements devraient prendre des mesures urgentes pour empêcher la propagation du COVID-19 et venir en aide aux populations les plus touchées, tout en veillant à ne pas porter atteinte aux droits humains, a déclaré aujourd’hui Human Rights Watch. Dans une nouvelle checklist comprenant 40 questions, Human Rights Watch a entrepris d’orienter la formulation de stratégies face aux défis posés par la pandémie.

La propagation du nouveau coronavirus, identifié pour la première fois en décembre 2019 à Wuhan, en Chine, a eu des incidences sur la santé, les libertés individuelles et les moyens de subsistance des populations, déclenchant une crise mondiale des droits humains. La nouvelle checklist fournit un ensemble d’options politiques pour atténuer l’impact des confinements et autres mesures de « distanciation sociale » et faire face aux retombées économiques de la pandémie pour les plus nécessiteux.

« Le COVID-19 représente un défi de santé publique colossal mais aussi une opportunité de répondre aux préoccupations de longue date relatives aux droits humains », a déclaré Akshaya Kumar, directrice du plaidoyer sur les situations de crise à Human Rights Watch. « Les politiques censées répondre à la crise devraient reconnaître que le bien-être de nos communautés dépend étroitement de celui des plus vulnérables. »

La checklist, qui s’ancre dans les recherches menées par Human Rights Watch à travers le monde, dessine les contours d’une réponse délibérément intersectionnelle et répond aux besoins des groupes les vulnérables face à la crise. Il s’agit notamment des personnes vivant dans la pauvreté, des minorités ethniques et religieuses, des femmes, des personnes en situation de handicap, des personnes âgées, des lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres (LGBT), des migrants, des réfugiés et des enfants.

Au 13 avril 2020, 210 pays et territoires avaient confirmé des cas de virus, avec deux millions de cas confirmés dans le monde et 119 000 décès.

Les réponses gouvernementales à la crise se sont accompagnées de restrictions draconiennes des droits, y compris les libertés de mouvement, d’expression et de réunion. Le droit international des droits de l’homme reconnaît que des menaces graves à la santé publique et des situations d’urgence publique, qui mettent en péril la vie même d’une nation, peuvent justifier des restrictions à l’exercice de certains droits. Mais celles-ci doivent avoir une base juridique, être absolument nécessaires, étayées par des preuves scientifiques, et leur application ne pas être arbitraire ou discriminatoire. De telles restrictions doivent en outre être de durée limitée, respectueuses de la dignité humaine, régulièrement réévaluées et raisonnables.

Pour prévenir efficacement la propagation du virus, les gouvernements doivent sensibiliser le public et réduire les obstacles qui se posent au dépistage, au traitement et aux soins. Certains gouvernements ont nié l’existence même d’une crise, d’autres élargi l’accès à l’information et aux soins de santé.

À la suite des critiques selon lesquelles leurs restrictions entraveraient la réponse au COVID-19, l’Éthiopie a levé une interdiction générale des services téléphoniques et de l’Internet dans la région d’Oromia, mettant fin à un blocage de trois mois, ce qui a permis aux communautés locales d’avoir accès à des informations vitales. Au Portugal, le gouvernement a annoncé que, jusqu’au 30 juin, les demandeurs d’asile et les migrants dont le dossier est en cours de traitement seraient considérés comme des résidents permanents, leur donnant ainsi l’égalité d’accès aux soins de santé nationaux. Au Pakistan, pour supprimer les obstacles aux soins, un responsable s’est publiquement engagé à venir en aide aux personnes transgenres.

Une gestion de crise respectueuse des droits humains doit faire face aux retombées économiques du coronavirus, en prenant les mesures nécessaires dans le respect des normes internationales relatives aux droits humains. Si de nombreux programmes économiques adoptés pour répondre au COVID-19 ne tiennent pas compte des travailleurs du secteur informel, certains pays ont pris des mesures importantes pour fournir des produits alimentaires, de l’eau et des logements aux populations vulnérables.

En Afrique du Sud, le gouvernement a appelé les municipalités à cesser de couper l’eau pour non-paiement des factures et, dans les implantations sauvages et autres communautés dans le besoin, distribue l’eau à l’aide de navires-citernes. Conscientes du rôle du logement dans la réponse à la crise, l’Argentine, l’Australie, l’Irlande et de nombreux autres pays ont annoncé des mesures pour mettre fin aux expulsions.

Alors que certains gouvernements ont recouru à des politiques abusives, d’autres ont élaboré une réponse proportionnée et équilibrée. les autorités sanitaires d’Angleterre et d’Écosse ont désormais autorisé la prescription à domicile d’une pilule abortive précoce pendant la quarantaine.

Dans le cadre des quarantaines ou du confinement, certains gouvernements ont laissé les forces de sécurité commettre des exactions en toute impunité. D’autres, cependant, ont pris des mesures adéquates contre les auteurs de tels actes. En Ouganda, des femmes ont été contraintes de se déshabiller par la police pour avoir supposément violé le couvre-feu en vigueur. En Afrique du Sud, des enfants ont été blessés alors qu’un homme a été abattu par la police devant son domicile dans le cadre de la mise en œuvre du confinement. Dans les deux cas, les autorités ont promis de poursuivre et de sanctionner les officiers responsables.

La distanciation sociale a été identifiée comme déterminante pour lutter contre la propagation rapide de COVID-19. Mais les gouvernements doivent formuler des politiques pour lutter contre les excès qui vont de pair avec la mise en œuvre des blocages et du confinement à domicile, notamment en élargissant le soutien psychosocial – les services de santé mentale –, en garantissant la continuité pédagogique pour les enfants malgré les fermetures des établissements scolaires, et en luttant contre les violences domestiques croissante et celles qui visent les minorités.

La France a annoncé le financement de 20 000 nuitées d’hôtel pour les femmes victimes de violences conjugales ainsi que la possibilité pour ces dernières de donner discrètement l’alerte dans les pharmacies à l’aide d’un code. En Italie, épicentre de l’épidémie en Europe, le gouvernement a lancé un programme national de soutien psychologique. En Australie, une « ligne d’assistance dédiée au bien-être » a été annoncée pour aider à faire face au coronavirus. Devant une rhétorique xénophobe croissante, les forces de police britanniques auraient ouvert des enquêtes sur des actes visant à blâmer les musulmans du Royaume-Uni, accusés d’avoir délibérément répandu le COVID-19.

Les exemples « positifs » ne sont pas cités en tant que modèles exacts de mesures que les gouvernements devraient adopter, mais plutôt comme des options à la disposition des gouvernements soucieux de s’acquitter de leurs obligations en matière de droits humains, a précisé Human Rights Watch.

« Bien qu’aucune réponse ne soit parfaite, il faut reconnaître que certains gouvernements à travers le monde prennent des mesures qui protègent la santé publique et respectent les droits humains », a conclu Akshaya Kumar. « Pourtant, sans un effort particulier pour prêter assistance aux populations les plus vulnérables, les sociétés auront du mal à se relever une fois la pandémie maitrisée. »

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