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En Guinée, le parquet demande la requalification des faits du massacre du stade en crimes contre l’humanité

Les audiences sont suspendues en l’attente de la réponse de la défense

Onze hommes accusés d'être impliqués dans le massacre de manifestants pro-démocratie par les forces de l'ex-junte militaire en 2009, et de nombreux viols commis lors de cet incident, photographiés (à droite) lors de leur procès à Conakry, en Guinée, le 28 septembre 2022. © 2022 Souleymane Camara/Reuters

Plus tôt ce mois-ci, lors du procès historique de l’ancien président guinéen et de 10 autres individus, dont des ex-ministres, accusés de responsabilité dans un massacre et des viols perpétrés dans un stade, le parquet guinéen a demandé la requalification des chefs d’accusation en crimes contre l’humanité. Le procès est actuellement suspendu jusqu’au 18 mars 2024, le temps de permettre à la défense de répondre.

Ce procès se penche sur l’un des événements les plus atroces de l’histoire de la Guinée. Le 28 septembre 2009, les forces de sécurité du pays ont ouvert le feu sur des manifestants prodémocratie pacifiques qui s’étaient rassemblés dans un stade de la capitale guinéenne, Conakry. Au moins 150 sont morts et de nombreux autres ont été blessés. Plus de 100 femmes ont été violées par les forces de sécurité. Celle-ci se sont ensuite lancées dans une opération de dissimulation organisée, faisant disparaître les corps dans des fosses communes.

Jusqu’à présent, les juges ont entendu chacun des 11 accusés, plus de 100 victimes et un peu plus d’une douzaine de témoins, dont de hauts responsables gouvernementaux, cités par toutes les parties au procès. Ils ont également examiné les preuves vidéo et audio des événements de 2009.

C’est sur la base de ces éléments vidéo et audio que le représentant du procureur, El Hadj Sidiki Camara, a demandé la requalification des charges. Il a ensuite déposé une demande officielle par écrit auprès du tribunal. Bien que partagé avec les parties au procès, cet argument n’est pas accessible au public.

Selon Human Rights Watch, qui observe le procès, et les médias, lors de la demande de requalification, le procureur a invoqué le droit de procédure pénale guinéen, arguant que la requalification est autorisée, et s’est appuyé sur les dispositions relatives aux crimes contre l’humanité incorporées dans le Code pénal guinéen de 2016.

Les parties civiles, c’est-à-dire les victimes qui se sont jointes à l’affaire en tant que parties officielles à la procédure, ont soutenu la demande du Ministère public devant le tribunal.

Après avoir entendu la défense, les juges décideront si la requalification des charges est appropriée. S’ils l’autorisent, ce serait la première fois que des crimes contre l’humanité seraient poursuivis en Guinée.

Selon une enquête de Human Rights Watch, les abus commis dans ce stade peuvent être assimilés à des crimes contre l’humanité. Une commission d’enquête internationale et le Bureau du Procureur de la Cour pénale internationale (CPI) sont parvenus à des conclusions similaires. Il appartiendra toutefois aux juges de se prononcer sur la demande de requalification, en abordant les allégations précises concernant les individus jugés.

La requalification des accusations pourrait se traduire par un plus grand impact du processus judiciaire, notamment en donnant le sentiment qu’une plus grande attention est accordée au traumatisme des victimes, des survivant-e-s et des communautés les plus touchées par ces crimes.

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